À l’occasion de la fête de l’Indépendance ukrainienne, le 24 août dernier, le préfet et directeur de la cellule interministérielle de crise (CIC) Ukraine, Joseph Zimet, a achevé sa mission commencée en mars 2022. Il a rappelé à cette occasion que la mise en œuvre inédite de la protection temporaire européenne avait permis d’accueillir rapidement en France les réfugiés ukrainiens fuyant la guerre.
Dans l’Hexagone, près de 100 000 personnes ont été accueillies entre le printemps et l’été 2022, grâce à une mobilisation exceptionnelle de l’État, des collectivités locales, des associations, des entreprises et des citoyens. Rappelons qu’environ 5,6 millions d’Ukrainiens ont fui à l’étranger depuis février 2022 (chiffres de juillet 2025), l’Allemagne (1,2 million) et la Pologne (1,1 million) étant les deux pays qui en ont, de loin, accueilli le plus. La dissolution de la mission interministérielle marque la sortie d’une logique de « crise immédiate » pour passer à une gestion courante et structurelle par les ministères et services publics habituels. Et par la mise en place de dispositifs pérennes. L’accueil, l’hébergement, la santé, l’emploi, l’éducation et les aides sociales des réfugiés sont en effet désormais gérés directement par les administrations classiques : préfectures, OFII (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration) France Travail, collectivités locales, associations.
Les conséquences de la fin de la mission interministérielle de crise ne sont cependant pas neutres. L’État français a déjà fortement diminué le nombre de places en centres d’hébergement d’urgence : de 19 500 places en 2022, il n’en reste que 4 000 en 2025. Les programmes d’intermédiation locative (ILM), qui permettaient aux ONG de sous-louer des logements privés, sont également en déclin, passant de 30 000 à seulement 11 000 places financées en 2025. Cette baisse s’explique par des contraintes budgétaires et une volonté de recentrer les aides sur d’autres priorités nationales.
Autre souci : l’hébergement citoyen, qui a joué un rôle clef depuis 2022, est désormais en déclin, faute de moyens et de soutien public. Environ 17 000 réfugiés ukrainiens avaient été accueillis par des particuliers, mais ce dispositif s’essouffle, laissant de nombreuses familles sans solution stables. On entre en réalité dans une phase de long terme, avec un accent mis sur l’intégration et l’insertion professionnelle.
Avec la prolongation du conflit, l’accueil des réfugiés ukrainiens ne peut plus être considéré comme temporaire et les associations ainsi que l’État soulignent la nécessité de passer d’une gestion d’urgence à des politiques d’intégration durable, notamment en matière d’accès au logement et à l’emploi. Cependant, cette transition s’avère difficile, car les Ukrainiens rencontrent les mêmes obstacles que les autres demandeurs d’asile (accès au logement, insertion professionnelle).
Face à la réduction des aides spécifiques, de plus en plus de réfugiés se tournent vers la procédure classique d’asile, ce qui alourdit la charge des services administratifs déjà saturés. En 2024, les demandes d’asile ukrainiennes ont été multipliées par quatre par rapport à 2023, représentant désormais une première demande sur dix en France. Reste que le statut de protection temporaire, qui permet aux Ukrainiens d’accéder rapidement à des droits (travail, santé, scolarisation, allocation), a été prolongé jusqu’en mars 2026 en raison de la poursuite du conflit. Sans cette prolongation, les bénéficiaires risquaient de se retrouver sans protection juridique.
Christophe Carmarans pour France Ukraine News
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Red : Compte tenu du passage d’une logique de « crise » à une gestion courante, le ministère de l’Intérieur français devrait prendre l’initiative et envisager le remplacement de l’APS par une carte de séjour. Un scénario positif serait également de retirer du document actuel le mot « Provisoire » et de prolonger sa durée d’au moins un an. Une telle mesure diminuerait le nombre de demandes d’asile, faciliterait considérablement la vie des réfugiés ukrainiens et favoriserait leur intégration en France.