Il y a un peu moins d’un an, les Jeux paralympiques de Paris (28 août – 8 septembre 2024) s’étaient achevés dans un climat très positif en France, à la suite de JO eux-mêmes considérés comme « très réussis » à tous points de vue par à peu près tout le monde, en France et en dehors. Ces 11 jours de compétition avaient, selon certains, fait avancer « de dix ans » la situation et la visibilité des personnes en situation de handicap dans le pays.
Ryadh Sallem, figure emblématique du handisport (six participations aux JO entre 1996 et 2024) avait ainsi estimé que ces JO, suivis par 65% de la population française selon les chiffres officiels, avaient constitué « un tournant majeur pour l’inclusion ». De fait, les fédérations sportives françaises ont enregistré une hausse de 15% d’inscriptions dans les clubs, de nombreux aménagements (sonorisation, voies praticables, véhicules adaptés) ont été créés et l’inclusion dans le travail des personnes handicapées s’est nettement améliorée dans le pays, tout en restant en dessous du seuil légal de 6% par entreprise.
Il n’en reste pas moins que, en 2025, le paysage est loin d’être idyllique. Et les restrictions budgétaires à venir, liées au montant massif de la dette de l’État français (114% du produit intérieur brut) ne présagent rien de bon pour les quelque 6 millions de Français éprouvant des limitations importantes dans leur activité quotidienne, du fait d’un handicap. Le Conseil de l’Europe fustige d’ailleurs régulièrement la France sur la question, en particulier dans ce qui touche à la scolarisation, aux soins ou aux transports.
Exemple extrême : seulement 45 stations du métro parisien sur 303 étaient accessibles aux handicapés fin 2024, soit 14% du réseau, contre 34% à Londres, 50% à Madrid, 83% à Barcelone ou 99% à Oslo. Si la France dispose globalement d’un cadre juridique solide et de dispositifs d’aide importants, l’accès effectif des handicapés aux droits, aux services, à l’emploi et à l’accessibilité reste entravé par des obstacles matériels, administratifs et sociétaux. Les actions récentes (réforme SERAFIN-PH 2025) montrent une volonté de progrès, mais les inégalités persistent, notamment pour les femmes, les enfants et les personnes vulnérables.
En Ukraine, la situation est évidemment bien pire. Aux 3 millions de personnes reconnues officiellement comme handicapées avant l’invasion russe de mars 2022 sont venues s’ajouter des centaines de milliers d’autres. Si l’on prend en compte les soldats blessés sur le front et les victimes civiles – dont le nombre ne cesse d’augmenter depuis l’intensification des attaques russes – la réalité est même effrayante.
Selon un rapport très récent de l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe), en 2025, le nombre de victimes civiles sur le territoire ukrainien est en effet en augmentation de 50% par rapport au premier semestre 2024. Les chiffres officiels communiqués par les autorités ukrainiennes, bilan malheureusement en constante évolution, font état d’au minimum 300 000 handicapés supplémentaires depuis le début de la guerre, dont de très nombreuses amputations (entre 20 000 et 80 000, selon les sources).
Si l’on ajoute aux blessures physiques, les traumas de tous ordres (chocs post-traumatiques, tortures, viols, séquestrations), les répercussions sont immenses et elles vont laisser des traces à très long terme sur les populations militaires et civiles. Bien que de nombreuses structures hospitalières aient été détruites en Ukraine depuis mars 2022, des unités de rééducation ont été mises sur pied pour faire face du mieux possible.
Exemple : le Centre Superhumans de Lviv qui répare les corps ravagés et sert d’exemple à suivre sur ce qu’il faudrait faire à bien plus large échelle. À l’été 2025, on estime par exemple à au moins 100 000 le nombre de vétérans de la guerre qui vont nécessiter une réadaptation intensive, chiffre auquel il faudra ajouter celui des civils de tous âges. Quand les armes se seront tues, c’est un défi gigantesque qui attend l’Ukraine pour la réadaptation de son système de santé. En attendant, les infrastructures sont condamnées à faire avec les moyens du bord, c’est-à-dire avec peu.
Christophe Carmarans pour France Ukraine News
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