Créé en 1946 au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le Festival de Cannes s’est imposé au fil des ans comme l’événement cinématographique le plus prestigieux du monde. La 77e édition (14-25 mai) ne déroge pas à la règle avec comme figure de proue l’Américain Francis Ford Coppola (83 ans) qui briguera une troisième Palme d’Or en présentant Megalopolis, son premier film depuis 2011.
Tout avait pourtant si mal commencé ! Créé à l’initiative du ministre français des Beaux-Arts et de l’Éducation Jean Zay pour concurrencer la Mostra de Venise, née dès 1932, le Festival de Cannes débute le 1er septembre 1939, du moins le croit-on. C’est en effet ce même jour que les troupes allemandes envahissent la Pologne, le début de la Seconde Guerre mondiale … Un seul film est projeté (Quasimodo de William Dieterle) et le festival est annulé sur-le-champ. Arrêté par Vichy en 1940 parce que juif et exécuté par la milice en 1944, Jean Zay –
« panthéonisé » en 2015 – ne verra jamais son projet prendre forme.
Il faut attendre le 20 septembre 1946 pour voir le festival éclore mais les débuts sont difficiles. Dans cet immédiat après-guerre, les temps sont durs et l’argent fait défaut, si bien que les éditions 1948 et 1950 sont annulées par manque de fonds. Jusqu’en 1954, c’est le Grand Prix du Festival International du film qui récompense le film jugé le meilleur comme par exemple Le Troisième Homme de Carol Reed (1949) ou Le Salaire de la peur d’Henri-Georges Clouzot (1953). Ce n’est qu’en 1955 qu’apparaît la Palme d’Or, fruit d’un concours entre plusieurs joailliers et symbole de la ville de Cannes dont la Croisette en bord de mer est bordée de palmiers.
Des films passés à la postérité
À cette palme très convoitée qui récompense la meilleure œuvre selon un jury composé de onze personnalités, s’ajoutent d’autres prix de prestige (Grand prix, Prix d’interprétation masculine et féminine, Prix de la mise en scène, du scénario et Prix spécial du jury). Célèbre pour ses polémiques enflammées, son tapis rouge et ses soirées extravagantes, le Festival aura surtout permis de couronner des films passés depuis à la postérité comme La Dolce Vita de Fellini, Le Guépard de Visconti, Taxi Driver de Scorsese, Apocalypse Now de Coppola, Pulp Fiction de Tarantino ou encore Parasite de Bong-Joo-ho, autant de réalisateurs pour qui, hormis Fellini déjà célèbre, Cannes aura servi de tremplin
Plusieurs réalisateurs ukrainiens se sont illustrés à Cannes : Maryna Vroda Palme d’Or du meilleur court métrage pour Cross en 2011, Miroslav Slaboshpitsky Grand Prix de la semaine de la critique pour The Tribe en 2014 et Sergei Loznitsa, sacré à Un Certain Regard en 2018 pour Donbass et qui sera présent pour la quatrième fois cette année sur la Croisette avec un documentaire intitulé L’Invasion.
Au-delà de la sélection officielle, le festival projette en général au moins 80 films dans différentes sections comme La Semaine de la critique née en 1962, la Quinzaine des réalisateurs créée en 1969 et devenue Quinzaine des cinéastes en 2022, catégorie qui met en lumière des metteurs en scène encore méconnus. Et aussi la Caméra d’Or instituée en 1978 pour le meilleur premier film ou encore Un Certain Regard qui date de la même année et célèbre le cinéma de genre. En 1983 un nouveau Palais des festivals a vu le jour, un bâtiment de 10 000 m2 dont l’architecture n’a pas fait l’unanimité, au point d’être surnommé « le bunker ».
Signe de la popularité croissante de cet événement désormais concentré sur douze jours, les cérémonies d’ouverture et de clôture sont retransmises en direct à la télévision depuis 1993 et sont encore davantage suivies internationalement depuis l’avènement d’internet et des plateformes spécialisées. Il faut dire, pour conclure, que le rayonnement mondial du festival tient dans sa spécificité : c’est celui qui, bien plus que tout autre, brasse le plus grand nombre de professionnels du 7e art dans un même lieu sur un laps de temps aussi court. C’est cela qui en fait un événement unique.
Christophe Carmarans pour France Ukraine News
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